Hamel c. Coopérative d’habitation Cyrille Vaillancourt Montréal, 2020 QCCS 2923
Un occupant d’un logement dans une coopérative d’habitation n’a pas de droit acquis à devenir membre
La Cour supérieure confirme que l’enfant d’un membre n’a pas de droits acquis à obtenir le statut de membre par le transfert des parts sociales de ses parents. Il doit se soumettre au processus d’approbation de sa candidature par le conseil d’administration.
Dans l’affaire Hamel c. Coopérative d’habitation Cyrille Vaillancourt Montréal, Mme Hamel désirait transférer ses parts sociales à son fils, qui occupait également son logement. Le conseil d’administration avait refusé ses demandes. Mme Hamel demandait l’annulation des décisions du conseil.
La Cour confirme que la demande de transfert des parts sociales doit être présentée au conseil d’administration. L’article 39 de la Loi sur les coopératives prévoit explicitement le pouvoir du conseil à cet égard :
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- Les parts sociales sont nominatives. Elles ne peuvent être transférées qu’avec l’approbation du conseil d’administration. Toutefois, des conditions supplémentaires de transfert peuvent être prévues par règlement.
D’ailleurs, en vertu de l’article 89 alinéa 2 de la Loi sur les coopératives, ce pouvoir ne peut être transféré à une autre instance de la coopérative, comme l’assemblée des membres.
Lors de l’analyse de la demande, le conseil exerce une discrétion et peut s’appuyer sur les critères applicables à une demande pour devenir membre :
[41] Le conseil d’administration juge que Monsieur ne rencontre pas les critères qu’ils se sont donnés pour accepter ou non un nouveau membre. Ils exercent alors une discrétion.
[42] Rappelons que Monsieur n’a aucun droit acquis à devenir membre de la Coopérative et que le conseil d’administration peut, dans sa sagesse, voire dans l’exercice de sa discrétion, décider de ne pas accepter telle ou telle autre demande.
Le conseil n’a pas à se comporter comme un tribunal :
[32] Les membres des conseils d’administration des coopératives d’habitation ne sont pas nécessairement des juristes et leur niveau de sophistication peut varier de l’un à l’autre.
[33] Ils n’ont pas à se comporter comme un tribunal judiciaire ou quasi judiciaire tout comme ils n’ont pas à tenir des auditions en bonne et due forme ni à rendre des décisions écrites motivées, sauf si la loi ne l’exige. À titre d’exemple, l’article 58 de la Loi sur les coopératives prévoit qu’une décision écrite doit être rendue en matière d’expulsion ou d’exclusion d’un membre. Il s’agit du seul article de cette Loi qui exige une décision écrite.
Le conseil doit traiter la demande avec justice et bonne foi :
[43] Les critères du conseil d’administration lui sont propres et le Tribunal n’a pas à intervenir dans ses décisions, à moins d’injustice flagrante équivalant à fraude ou de mauvaise foi.
C’est également ce que la Cour avait déterminé dans l’affaire Tcheng c. Coopérative d’habitation Chung Hua. La Cour écrivait alors que « le Conseil doit agir de bonne foi et ne doit pas se comporter d’une manière abusive ».
L’opinion de la Cour s’appliquerait également dans le cas d’un membre qui voudrait, à son départ de la coopérative, transférer ses parts sociales à un autre occupant du logement. Cet autre occupant n’aurait pas de droits acquis à les recevoir et devrait se soumettre au processus d’approbation de sa candidature par le conseil d’administration.
De façon générale, la Cour confirme et applique l’ensemble des principes dégagés par l’affaire Arab c. Coopérative d’habitation Adrienne concernant le rôle limité de la Cour supérieure lorsqu’elle est saisie d’une demande d’annulation d’une décision d’un conseil d’administration d’une coopérative d’habitation (voir notre résumé).